Figure 1
Copie du prototype international du kilogramme.

Figure 2
Coffre contenant le prototype international du kilogramme, conservé dans l’air au bipm sous 3 cloches de verre ainsi que ses 6 copies officielles.

Figure 3
Dépendance des unités du Système International.

Figure 4
Quelle constante fondamentale choisir pour la redéfinition du kilogramme?

Figure 5
Max Planck

Figure 6
Nouvelles définitions des unités.

Vers une nouvelle définition du kg

Raccordement du kilogramme à une constante fondamentale

Problématiques liées à la définition actuelle du kilogramme

La définition et la réalisation du kilogramme sont confondues dans l’artefact ϰ (figures 1 et 2). Cette confusion renvoie à plusieurs problématiques :

Le fait de voir l’écart de masse entre les six témoins et le prototype international du kilogramme évoluer est un indice fort de l’évolution de la masse de ϰ par rapport à une référence stable, comme la masse d’une particule. Alors, à prendre la définition de l’unité de masse, on arrive à la conclusion que la masse du prototype international du kilogramme, m(ϰ), ne varie pas, tandis que la masse d’un électron par exemple dans le SI, varierait au cours des décennies : cela est a minima insatisfaisant. Par ailleurs, la tendance à l’accroissement de masse des copies officielles (relativement à ϰ) observée durant les trois premières vérifications (1889, 1946, 1988-1992) n’a pas été confirmée par la dernière vérification : ces résultats montrent que la différence de masse entre ϰ et ses copies officielles n’a changé en moyenne que de 1 µg : la dérive des copies par rapport à ϰ n’est pas prévisible.
En sus de l’arrêt de la dérive observée précédemment, l’unité de masse maintenue au BIPM depuis la troisième vérification à partir d’une dizaine de kilogrammes en platine iridié a été déterminée comme erronée de 35 µg [16] relativement à la masse de ϰ (soit 3,5×10-8 en valeur relative). L’évolution de ce décalage dans le temps (de 1992 à 2014) a été modélisée en supposant une diminution de masse des prototypes proportionnelle au nombre de pesées dans les comparateurs de masse. Les corrections sur les valeurs des étalons nationaux ont été calculées a posteriori. L’incertitude-type associée a été déterminée à 3 µg et l’ensemble de ces informations transmises aux instituts nationaux de métrologie (INM) à la fin 2014 : l’unicité de la réalisation du kilogramme rend les erreurs difficiles à détecter, puisque des intercomparaisons entre réalisations primaires ne sont pas possibles.
Cette situation problématique dans le domaine des masses l’est également pour les unités qui en dépendent : la mole, la candela et surtout l’ampère [17,18,19] et donc, par extension, l’ensemble des unités électriques. En effet, bien que les grandeurs de base soient, par convention, considérées comme indépendantes, l’examen de leur définition montre que certaines d’entre elles sont liées (figure 3). C’est en particulier le cas de l’ampère dont la définition fait intervenir une force s’exprimant elle-même en fonction du mètre, du kilogramme et de la seconde : les faiblesses de la définition du kilogramme se répercutent sur d’autres unités du SI.
Pour des raisons de disponibilité, de pérennité et d’universalité du kilogramme (et des unités qui en dépendent), il est donc indispensable d’en changer la définition actuelle basée sur un artefact matériel unique. Cet artefact, de masse constante par convention, est en réalité physiquement variable du fait des effets de l’usure, du dégazage et de la contamination superficielle et il est impossible à copier à l’identique, c'est-à-dire au microgramme près en termes de masse.

Raccordement du kilogramme à une constante fondamentale

Quelle constante fondamentale choisir pour le kilogramme?

Des principes physiques variés, comme le « comptage » d’ions pour former une masse d’atomes d’une dizaine de grammes [20] ou encore la lévitation d’une masse supraconductrice [21,22] ont été envisagés pour établir le lien entre le kilogramme et une ou plusieurs constantes fondamentales de la physique. Après des réflexions sur les nouvelles définitions, et sur le choix des constantes qu’il serait le plus pertinent de fixer (figure 4) [23,24,25], et bien qu’une définition fondée sur la constante d’Avogadro NA [26] – selon laquelle le kilogramme serait constitué d’un nombre donné d’atomes – soit conceptuellement simple, un consensus s’est dégagé pour déterminer le kilogramme à partir de la valeur de la constante de Planck [27] (figure 5) pour les raisons suivantes:


La modification de la définition du kilogramme s’inscrirait alors dans une redéfinition globale des unités du SI, permettant d’élaborer un système d’unités reposant entièrement sur des constantes fondamentales

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Nouvelle définition du kilogramme

Dans un premier temps, il s’agirait d’effectuer des déterminations de la constante de Planck dans le SI actuel (et donc avec la masse du prototype international du kilogramme exactement égale à 1 kg) au moyen de balances du watt ou de sphères de monocristal de silicium isotopiquement pur (utilisant une méthode dite X-ray-crystal-density), les expériences les plus prometteuses en termes d’incertitudes.
Puis, une fois la robustesse de ces différentes déterminations établies (cohérence, incertitude), d’inverser le sens de l’expérience et de déterminer une masse (par exemple celle du prototype international du kilogramme, mais plus vraisemblablement de tout autre étalon de masse) en se donnant une valeur fixe de la constante de Planck.
On effectuerait alors une « réalisation primaire » de l’unité de masse (par les balances du watt ou les sphères de silicium), point de départ de la dissémination de l’unité de masse aux utilisateurs (« mise en pratique de la définition du kilogramme»).
La 24ème CGPM [29] en 2011 propose selon ce principe une nouvelle définition à constante explicite pour le kilogramme (mais avec pour l’instant une valeur à préciser pour la constante de Planck), de même que pour les autres unités de base, et cela dans le cadre d’une refonte globale des définitions des unités de base du SI, définies également à constantes explicites [27] :« Le kilogramme, symbole kg, est l’unité de masse ; son amplitude est déterminée en fixant la valeur numérique de la constante de Planck à exactement 6,62606…×10-34 lorsqu’elle est exprimée en m².kg.s-1, unité du SI égale au joule seconde, J.s. »
Cependant, lors de sa 25e session en 2014, l’assemblée constate que « malgré les progrès effectués [dans les déterminations de h], les données disponibles ne semblent pas encore suffisamment robustes pour que la CGPM adopte le SI révisé [et donc la nouvelle définition du kilogramme] » [30]. En effet, les conditions sur les valeurs de la constante de Planck exigées par le Comité international des poids et mesure (CIPM) avant de procéder à une redéfinition du kilogramme s’appuyant sur une valeur de h, sont notamment que trois expériences indépendantes (incluant des balances du watt [31] et des expériences de sphère de silicium [32]), permettent d’obtenir des valeurs cohérentes de la constante de Planck, avec des incertitudes-types relatives qui ne soient pas supérieures à 5×10-8 et dont l’une au moins possèderait une incertitude-type relative qui ne soit pas supérieure à 2×10-8 [13]. Une telle exigence sur les niveaux d’incertitude est en effet le seul moyen de garantir la continuité historique de la valeur du kilogramme (conservation de sa magnitude lors des redéfinitions successives), de même qu’elle est le seul moyen pour que cette définition n’entraîne pas d’écart significatif sur les valeurs de masse conventionnelle des poids et masses-étalons de la classe d’exactitude la plus élevée (E1) définie selon la recommandation R111 de l’Organisation internationale de métrologie légale (OIML): autrement dit, il est nécessaire de pouvoir étalonner des masses de 1 kg en acier inoxydable avec une incertitude-type relative inférieure à 8×10-8 [33], cela sous-entend de maîtriser l’étalonnage de masse en platine iridié à 5×10-8 ou mieux.

La redéfinition est donc finalement prévue pour 2018...